Transparence publicitaire sur Internet et ad blocking
Écrit par B. Bathelot, le 22/03/2016Dans le domaine de la publicité, la notion de transparence peut avoir deux sens. Elle peut faire référence à la transparence des pratiques de facturation et de commercialisation vis à vis d'un annonceur (Loi Sapin) ou au fait qu'une publicité soit clairement identifiée comme telle par l'individu exposé. Ce billet va traiter de cette deuxième notion dans le contexte Internet. La transparence publicitaire peut être alors définie simplement comme la capacité de la personne exposée à percevoir qu'un contenu ou message est une publicité payée par un annonceur.
Les médias publicitaires traditionnels (sauf peut être l'affichage) ne sont pas épargnés par la problématique ou le souci de transparence. Le publi-communiqué en presse ou le placement produit en TV sont par exemple des domaines où les questions de transparence se sont posées avant que les pratiques soient plus ou moins régulées par le droit et les codes déontologiques.
Internet est par nature un domaine où la question de transparence publicitaire s'est souvent posée. Elle s'est par exemple posée à l'époque avec l'apparition des liens commerciaux et la question de leurs identifications ou avec les billets de blogs sponsorisés. Plus récemment, se sont des YouTubeurs qui sont dans le collimateur de la DGCCRF pour pratique commerciale trompeuse ou publicité dissimulée.
La montée de l'adblocking et la pression ou menace qu'il engendre pour les sites éditeurs ne sont pas sans conséquence sur cette transparence publicitaire. En effet, pour éviter d'être filtrés, les éléments publicitaires ont une forte tendance à sortir de leurs emplacements traditionnels. Bien qu'initialement enclenchée pour éviter le phénomène progressif de banner blindness, la migration vers les formats de native advertising et autres éléments sponsorisés (blog, tweet, post, vidéo, etc.) semble dernièrement s'être très fortement accélérée en réaction aux adblockers. L'effet est pervers, car pour éviter le blocage d'affichage, qu'il soit automatique ou sur demande de l'utilisateur, l'éditeur a souvent intérêt à ce qu'aux niveaux techniques et visuels la publicité se confonde avec les autres éléments de contenus.
Dans l'exemple ci-dessous, Allociné inclut la publicité dans les éléments classiques de son slideshow. Même si l'éditeur joue le jeu et signale relativement clairement le caractère sponsorisé du contenu. On peut penser que l'utilisateur n'y gagne pas en transparence publicitaire effective.
Dans d'autres cas, la transparence est plus discutable ou tout au moins elle n'est effective qu'à posteriori. Ainsi, sur un site lui aussi consacré au marketing, j'aurais souhaité être prévenu avant lecture, du caractère publicitaire ou sponsorisé d'un article. Le ton très favorable de l'article m'avait cependant donné quelques indices.
Ce ne sont ici que quelques exemples, parmi de très nombreux autres, de la complexité de la question de la transparence publicitaire sur Internet. La montée du brand publishing qui n'est pas toujours très bien signalée en est un autre.
Même s'il existe un cadre légal devant assurer cette transparence, la question est tout autant déontologique que réglementaire car les dispositions actuelles ne se prêtent pas à une délimitation claire des pratiques dans un contexte digital en perpétuelle évolution.
En dehors des considérations légales et déontologiques, un autre problème se pause sur Internet pour délimiter clairement la publicité. L'attention visuelle aux éléments périphériques et leur interprétation plus ou moins consciente sont souvent limitées chez l'internaute. On peut ainsi penser qu'un nombre non négligeable d'utilisateurs de Facebook ne fait pas la différence entre des publications organiques et des publications sponsorisées. Hors, comme cela a déjà été évoqué, délimiter très clairement les limites des espaces publicitaires, favorise la cécité publicitaire (banner blindness) et le filtrage par les adblockers.
La question de la transparence publicitaire, présente déjà depuis de nombreuses années sur Internet, ne semble donc pas devoir se "régler" à court terme, et il est même probable que la situation se dégrade. Bon courage au législateur et à l'ARPP !